Pierre Moreau, un collectionneur d’étiquettes hors pair, et grand amateur de rhums.
Originaire de la Mayenne, Pierre MOREAU est tombé amoureux de la Martinique, après qu’il en ait épousé une de ses plus belles ambassadrices, rencontrée à Nantes alors qu’il était étudiant à l’ENSM, devenue depuis l’Ecole Centrale de Nantes. Ils ont vécu en Martinique de 1965 à 1968 et ont eu deux enfants. Un garçon né à Nantes, et une fille née à Fort-de-France. C’est au cours de cette même période que Pierre a commencé à s’intéresser au rhum…
Ingénieur de formation, en travaux publics, Pierre MOREAU a effectué sa carrière dans le bâtiment. Tout d’abord en tant qu’Ingénieur pour la SUPAE, filiale de la SAE (Société Auxiliaire d’Entreprises) puis, les cinq dernières années d’activité, en tant qu’Expert d’assurés à la SNE (Société Nouvelle d’Expertises). Il a pris sa retraite en 2001 pour notamment se consacrer pleinement, à ses passions, la Randonnée pédestre et le Rhum. Entre temps, Pierre et son épouse avaient passé 13 ans en Côte d’Ivoire, de 1977 à 1990.
« Pendant 35 ans je n’ai dégusté que le rhum blanc de Martinique et uniquement en Ti-punchs. Puis plus tard, bien plus tard, à partir de l’an 2000, j’ai découvert d’abord les rhums de la Guadeloupe, notamment ceux produits par Damoiseau, puis tous les autres rhums, de tradition anglaise et espagnole ».
Quand Pierre prend sa retraite, en 2001, il devint membre de « l’Académie du Rhum », fondée par Charles CLAUDE (dit Charly), propriétaire à l’époque du restaurant « La Créole » du Boulevard Montparnasse. Charles CLAUDE lui fit découvrir tous ceux qui comptaient dans le milieu parisien du rhum. Il y rencontre notamment Pierre Barthélémy ALIBERT, auteur de « La Fabuleuse Aventure du Rhum » – et de nombreux ouvrages sur les cocktails à base de rhum – Jean-Marie CORNEC, Président-fondateur de « Rhums et Cigares » et Dominique LOUVILLE, propriétaire de la « Rhumerie » du boulevard St Germain.
C’est à cette époque également qu’il fait la rencontre d’Alexandre VINGTIER, rédacteur en chef de Rumporter, et de Cyril HUGON, le fondateur de Rhum Fair, devenu Rhum Fest aujourd’hui.
Aujourd’hui, Pierre fait partie de l’association : « Rhums du Monde » (http://www.rhumdumonde.com) créée par Marc GOUBERT, son Président actuel et auteur de « Connaître et apprécier les rhums ».
Comment Pierre a-t-il connu la Maison du Rhum Paris ?
Au cours d’une soirée j’ai fait la connaissance du Père d’Eddy, Gérard LA VINY, (surnommé l’Ambassadeur des Antilles NDLR). Depuis, je suis resté en contact avec Eddy.
Quelle est la passion de Pierre ?
« Dès les années 90, je me suis intéressé aux étiquettes de rhums. Si bien que de 1990 à 2001, je m’étais constitué une petite collection, répartie dans 5 classeurs ». Pierre fait désormais partie du monde des collectionneurs, qui se regroupent en général autour de trois grandes associations en Fance. Aujourd’hui, la collection de Pierre comporte 180 classeurs ! Avec pas moins de 40 à 50 000 documents (étiquettes, publicités, plaquettes, articles, et caetera).
Pierre est aujourd’hui un homme qui compte dans l’univers du rhum. Non seulement il participe à de nombreuses masterclass, mais il est aussi Juré pour divers concours agricoles, et surtout, il est souvent sollicité pour ses étiquettes. Il a ainsi fourni des illustrations pour différents ouvrages, sur le rhum bien entendu, et contribue à la décoration de diverses manifestations (« Rhum Fest » de Paris et Marseille par exemple). Il élabore notamment des tableaux thématiques de 50X80, sur la Martinique, la Guadeloupe, la Réunion, ou d’autres pays producteurs, sur les femmes, les bateaux, les corsaires, etc, à partir de reproductions de ses étiquettes.
Ainsi, plusieurs auteurs l’ont mis à contibution. Citons par exemple Pierre Barthélémy Alibert, qui a recouru à ses services pour illustrer son livre « La fabuleuse aventure du Rhum », mais aussi Patrick Mahé, journaliste et écrivain français qui a écrit « Culture rhum », illustré avec des étiquettes de Pierre.
Pierre n’est pas peu fier non plus d’avoir été le seul métropolitain à avoir été interviewé pour l’ouvrage qui est sorti pour fêter les 10 ans de « La SAGA du RHUM », le musée du Rhum situé à la Réunion.
Pierre est donc un passionné, mais il n’est pas le seul à s’adonner à cette passion et cela l’occupe parfois beaucoup, comme on peut s’en douter. Ainsi, avec Dominique JULLIEN, un autre passionné, fondateur de http://www.etiquettesderhum.com, Pierre est allé à l’INPI (Compiègne) où ils ont pu photographier plus de 2 000 étiquettes de rhum en couleurs, datant de 1880 à l’entre 2 guerres.
En outre, Pierre suit aussi les enchères des sites eBay et Delcampe. Quand il n’obtient pas une enchère, il s’arrange toujours pour obtenir un cliché photographique.
Quelle étiquette a sa préférence ?
Comme tout grand collectionneur, Pierre a une préférence. Elle a un format horizontal et elle est très esthétique. Cette étiquette représente la baie de Saint-Pierre, en Martinique, avec une femme.
Pourquoi ? C’est très simple. Saint-Pierre, c’est l’Ile de son épouse, et Saint-Pierre, ce fut la capitale mondiale du rhum jusqu’en mai 1902, date de l’explosion de la montagne Pelée, qui a fait plus de 30 000 morts et 20 000 sinistrés.
En tant que collectionneur, c’est bien entendu la beauté des étiquettes qui l’intéresse. Et Pierre de souligner « qu’elles étaient plus belles fin 19ème début 20ème. Et en particulier celles des imprimeurs, qui les proposaient aux maisons qui commercialisaient les bouteilles de rhum (ce dernier étant reçu en tonneaux). Elles étaient parfois vernissées et comportaient de nombreux éléments esthétiques comme des visages de femmes, des voiliers ou des vues de la rade de Saint-Pierre ».
Quel rhum a sa préférence ?
« Le rhum qui est le meilleur, c’est celui que vous avez apprécié ». Pierre MOREAU n’a pas de préférence, même s’il avoue « vous ne pouvez pas être déçu par le rhum agricole de la Martinique, surtout s’il comporte la mention AOC et qu’il a donc été évalué par un Jury. C’est tout de même gage de qualité ». Il y a peu, au Concours Général Agricole, il délivrait, avec ses confrères, une médaille d’or à un rhum de Guadeloupe. « Aujourd’hui, il y a au moins trois distilleries qui font aussi bien que les Martiniquais : Bielle, Damoiseau et Longueteau ». Il reconnait par ailleurs que les rhums issus de la méthode Solara (Rhums Sud-américains pour la plupart), ont beaucoup de succès aujourd’hui.
Une anecdote autour du rhum ?
Les étiquettes déclenchent parfois des confrontations pour le moins étonnantes. Pierre nous a raconté la joute entre deux collectionneurs bien connus, au cours d’une enchère. Il s’agissait d’un Métropolitain qui résidait en Guadeloupe depuis plus de trente ans, et d’un Guadeloupéen, qui vit en Métropole, lui aussi depuis plus de trente ans. Ils s’estimaient, peut-être à juste titre, tous les deux dépositaires du patrimoine rhumier de la Guadeloupe !
« Ils ont enchéri l’un contre l’autre sur une étiquette d’un rhum guadeloupéen, proposée sur un site d’enchères. Leurs propositions sont tellement montées que l’étiquette a atteint le prix exorbitant de plus de 400 € ! », montant très surestimé compte-tenu de l’étiquette, somme toute très ordinaire mais qui était unique.
Cette petite anecdote reflète bien la passion que suscitent parfois les étiquettes auprès des collectionneurs. Et quand à cela se rajoute une petite rivalité « régionale » entre deux collectionneurs, celle-ci est d’autant plus exacerbée. A titre d’exemple, une étiquette dépasse exceptionnellement 150 €. Le monde des collectionneurs, d’ailleurs essentiellement franco-français, est tout petit. En outre les trois plus grands collectionneurs d’étiquettes de rhum sont décédés ces dernières années et les enchères s’élèvent généralement maintenant à rarement plus de quelques euros …
Merci à Pierre Moreau pour cette interview.